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Au-delà de la figure obligée d'irrévérence forcée dans laquelle se complaisent souvent les médias, jusqu'à la puérilité, le titre même de la chronique, ce jour-là, était fidèle à une tradition de dénigrement. Et le tout, en guise d'un suposé "clin dœil" à Boris Vian (J'irai cracher sur vos tombes)... La fréquence même des "clins dœil" en vigueur dans les médias, doit faire réfléchir.



“ Vous, les hommes supérieurs, – ainsi parle la populace en clignant de l’œil – il n’y a pas d’hommes supérieurs, nous sommes tous égaux... ”


Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra

  

Car c'est justement sous le motif d'une sorte de mise au point, selon laquelle, "avec Saint-John Perse, tout commence et tout finit par un malentendu" que Laurent Neumann va justement, sans le savoir je crois, synthétiser en quelques minutes certains des clichés les plus courants à propos de Perse. Je dis bien "sans le savoir", car Laurent Neumann, qui est par ailleurs un journaliste tout à fait honorable, aux analyses fines en matière politique, se montre en l'occurrence d'une discipline assez exemplaire pour commettre les erreurs habituelles à propos de Saint-John Perse. Ainsi, croyant déceler un premier "malentendu" à propos du pseudonyme, c'est au contraire lui qui commet le premier, en déclinant ce qu'il croit être la vraie identité du poète, confondant le premier pseudonyme "Saint-Léger Léger" avec l'authentique patronyme, Leger. L'erreur, factuelle, ne serait pas grave, si elle ne venait à l'appui d'une formule à l'emporte-pièce sur le choix de ce pseudonyme "de faux-jeton", pour reprendre la délicate citation, qui donne encore l'occasion de railler la vision de l'énigme qu'y voit de Villepin. Passe encore : simple frivolité...

> Une image peu enviable

Saint-John Perse vu par les médias - LE GRAND MALENTENDU

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© 2014 Saint-John Perse, le poète aux masques (Sjperse.org / La nouvelle anabase). Site conçu, écrit et réalisé par Loïc Céry.

  

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Un exemple : « Esprits libres »,

France 2, février 2008

L'erreur, factuelle, ne serait pas grave, si elle ne venait à l'appui d'une formule à l'emporte-pièce sur le choix de ce pseudonyme "de faux-jeton", pour reprendre la délicate citation, qui donne encore l'occasion de railler la vision de l'énigme qu'y voit de Villepin. Passe encore : simple frivolité... Mais à peine a-t-on eu le temps de méditer sur la profondeur de l'ironie, que se profile déjà "le deuxième malentendu", entendez, celui qui touche à l'œuvre elle-même. Reprenons le propos de Laurent Neumann : "Le deuxième malentendu, c'est le poète raffiné, homme de culture, mais d'un abord, il faut bien le dire assez difficile : les titres de ses livres sont abstraits - Anabase, Amers, Vents... Son oeuvre est bien sûr traduite dans le monde entier mais il n'a jamais connu le succès populaire, et quand à l'âge de soixante-treize ans, enfin, il reçoit le Prix Nobel de Littérature, c'est dans l'indifférence générale, ce qui fera dire à Antoine Blondin, jamais avare d'un bon mot : "Saint-John Perse... mais il y a mis le temps" ".  On est héberlué face à tant de substance, mais essayons d'y voir clair : à l'appui de cet inévitable "abord difficile" (qui suffit, en soi, à fournir un motif de dépréciation), le caractère "abstrait" des titres des recueils : quoi de plus abstrait, en effet, que les vents, l'anabase ou les amers (on aurait pu aussi évoquer les pluies, les neiges, les éloges). On en arrive tout logiquement à l'absence de succès populaire, à l'aune duquel bien sûr se mesure toute oeuvre littéraire... le tout se terminant sur la pirouette éculée de la citation attribuée à Antoine Blondin... Il faut comprendre, certainement, dans cet ensemble compact, que Saint-John Perse est surtout un poète abscons dont ne seraient-ce que les titres d'ouvrages sont difficiles d'accès, un poète qui n'a jamais trouvé son public, et pour cause. C'est justement le côté "compact" d'un ensemble aussi accablant qui suffit, dans un temps aussi réduit, à évacuer toute l'oeuvre poétique. L'affaire est réglée.

Le prestige de la carrière du diplomate est souligné, et on est soulagé quand dans l'énumération des négociations cruciales de l'entre-deux-guerres auxquelles Leger a pris part, Laurent Neumann lui reconnaît au moins de n'avoir pas été "munichois", contrairement à l'idée répandue. C'est sans compter avec la trop grande tentation d'instruire le procès selon lequel "Saint-John Perse est passé à côté de l'Histoire", en vertu de son anti-gaullisme qui, pour ne pas être confondu pour autant avec une quelconque complaisance envers Vichy, est porté tout entier à son discrédit ; pareille chronique, consacrée à d'autres anti-gaullistes fameux tels Bernanos ou Saint-Exupéry, n'aurait certainement pas été d'un tel manichéisme, qui permet même au journaliste de dire que Leger en 1940 "abandonne sa vieille mère". Passons, encore... La conclusion, devant l'absence de tout représentant du gouvernement français le jour du Nobel fait tout de même justice à Perse : "à cet instant précis, le mal entendu, c'est Saint-John Perse". La formule est intéressante, mais reste de l'ensemble comme une impression amère, et domine surtout la persistance de cette image définitive d'un poète hermétique. Dominique de Villepin, par la suite interrogé par Guillaume Durand en plateau, tente de défendre la position de Perse vis-à-vis de de Gaulle... Mais, on peut le craindre, la chronique passée, le rouleau compresseur des clichés a agi, et surtout à l'encontre de l'oeuvre poétique. Et le malentendu, au contraire, est bien celui d'un regard aussi superflu, aussi faussement irrévérencieux et tout compte fait, aussi navrant.


Il se pourrait bien que ce malentendu réside, finalement, dans la difficulté voire l'impossibilité de transmettre de manière satisfaisante une oeuvre littéraire exigeante, par le biais d'un message médiatique court et visant la séduction complaisante du public. La littérature repose aussi sur une temporalité propre et répond à des modalités de transmission qui seulement à titre exceptionnel peuvent s'accomoder des miroitements du discours médiatique. Il y faut alors l'engagement de professionnels scrupuleux : on connaît ce constat effectué devant la difficulté, par exemple, de parler avec efficacité de certains domaines culturels à la télévision. Il se pourrait bien donc, comme pour la philosophie, que la poésie (en tout cas une certaine poésie qui n'a rien à voir avec le miroitement justement, ou toute autre oeuvre de l'esprit relevant d'une exigence aussi haute), ne puisse sans dommage, être transmise par ce biais d'un média de masse. Les concessions en termes de raccourcis, pour y revenir, et de survols approximatifs, qui y sont monnaie courante voire loi constituante, sont autant d'obstacles quasi-insurmontables pour qui a le souci ne serait-ce que de présenter de manière correcte une oeuvre donnée. Le plus souvent, ce sont les trivialités effrénées, et autres frivolités qui polluent toute attention vraie, là où s'imposerait la rigueur voire la lenteur indispensables à toute présentation de cet ordre. Non, décidément, la diffusion d'un poète comme Saint-John Perse, dont l'accès n'est qu'exigence si l'on veut y voir autre chose que de l'hermétisme, n'a rien à gagner dans cette vulgarité de l'immédiat qui se satisfait d'étiquettes sommaires. A remarquer d'ailleurs qu'à ce jeu des images tronquées, l'idée même de la poésie et de l'art demeure associée depuis bien longtemps dans une sorte d'inconscient collectif forgé par les théorèmes de la fausse modernité, au modèle de la subversion. Quoi de plus trivial, de plus facile, de plus commode que d'associer en l'occurrence, l'idée de poésie, à l'idéal de fronde juvénile attribuée comme par réflexe pavlovien, à la fameuse photo-icône de Rimbaud ; quoi de plus aisé que de retenir de la poésie du XXe siècle l'aventure des poètes de la Résistance, les Eluard ou autre Aragon, ou l'esthétique rassurante d'un Prévert ; quoi de plus aisé que de se complaire, pour tout média de masse, en somme, à une imagerie prédéterminée vaguement héritée du romantisme... A ce jeu là, Saint-John Perse, avec son idéal de maîtrise, son éthique de l'éloge du réel, n'entre décidément pas dans les cases prévues par la vulgate établie. Il n'est pas loin, on peut même le deviner, de présenter  a contrario une image répulsive, face à ces étiquettes préfabriquées, d'autant plus que s'il s'agit d'être jaugé à l'aune de son image supposée, il présente tous les handicaps, en dehors même de son esthétique : poète et homme d'action certes, peut-être encore cela irait-il s'il s'agissait de l'une des figures choyées de l'engagement... Mais non : le haut fonctionnaire, l'éminence grise, l'homme de dossiers, la réputation de son attitude hautaine, sa pose devant l'objectif du photographe... Tout, décidément tout, dessert Saint-John Perse au jeu de l'image d'Epinal du poète maudit tant prisée par les amateurs de clichés. Mais ce n'est pas tout : de la tentation de caricature à la réelle malveillance, les médias se font souvent les réceptacles d'une autre propagande "anti-Perse", puisqu'il en existe bien une...


  

On l'a compris : l'image de Saint-John Perse véhiculée dans les médias, au gré des présentations de son oeuvre, n'a rien de très encourageant pour qui voudrait le découvrir réellement. Poète d'accès très difficile voire impossible, dissimulateur compulsif, diplomate à l'attitude discutable... Tout en ne tombant pas dans les excès de cette charge-là, l'exemple envisagé ici à titre d'illustration, est néanmoins assez révélateur : recevant le 1er février 2008 dans son émssion "Esprits libres" sur France 2 l'ancien Premier Ministre Dominique de Villepin pour son livre Hôtel de l'insomnie, Guillaume Durand annonce une chronique à propos de Saint-John Perse signée par le directeur de publication de Marianne, Laurent Neumann. Dans l'émission, le journaliste effectue chaque semaine cette chronique consacrée aux grandes figures de la littérature du XXe siècle, en une manière de billet qui se veut irrévérencieux, sous le nom évocateur de "J'irai cracher sur...", en clin d'oeil à Boris Vian. Pressentant sans doute une probable attaque, de Villepin précise d'entrée de jeu "un Saint-John Perse qu'on connaît mal..." Il ne croyait pas si bien dire...